À Turin, le pape demande l’ouverture aux immigrés

21 juin 2015 Non Par Les_migrants_afrique

À Turin, le pape demande l’ouverture aux immigrés

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Le pape François a dénoncé dimanche, dans sa première visite à Turin, dans le nord industriel de l’Italie, les collusions mafieuses et la corruption devenue quasi « normale », et a invité les Italiens à ne pas se fermer aux immigrés.


L’occasion de son voyage dans cette région, qui est aussi celle de ses origines italiennes, était « l’ostention » (exposition au public) du Saint-Suaire dans la cathédrale Saint-Jean Baptiste, qui prend fin dans trois jours.
Lors de l’Angelus, le pape a eu un franc succès en se déclarant « petit-fils » du Piémont, devant quelque 60.000 fidèles enthousiastes sur la grande place piazza Vittorio, au coeur de la cité.
Le pape est né à Buenos Aires en 1936 et sa famille du côté paternel avait immigré avant sa naissance de Portacomaro, bourgade du Piémont, près d’Asti, vers l’Argentine.
Auparavant, dans le moment le plus religieux de sa visite, François s’était recueilli devant le Suaire que des centaines de catholiques sont déjà venus voir depuis le début de son « ostention » en avril.
Ce linceul, qui aurait enveloppé le corps du Christ, est entouré d’une grande dévotion même si l’Eglise n’en fait pas un objet de foi, reconnaissant les recherches de chercheurs qui établissent sa fabrication possible au Moyen Age. Mais elle y voit un objet de piété capable de rapprocher du mystère de la passion de Jésus.
« Le Suaire attire vers le visage et le corps martyrisé de Jésus, et, en même temps, nous amène à considérer le visage de toute personne souffrante et injustement persécutée », a affirmé le pape à l’Angelus.

– ‘Marchandises’ –
Devant le monde du travail, François avait déploré auparavant les manifestations de rejet des immigrés, particulièrement sensibles dans le nord de l’Italie, au moment où l’Union européenne est divisée sur leur accueil.
« Si l’immigration augmente la concurrence (économique), ils ne peuvent en être rendus coupables, parce qu’ils sont victimes de l’injustice, de l’économie du rejet et des guerres. Des êtres humains ne doivent pas être traités comme des marchandises! », s’est-il exclamé.
François a pourfendu des maux italiens: « non à la corruption, qui est aujourd’hui si fréquente qu’elle semble devenue un comportement normal, non aux collusions mafieuses, aux escroqueries, aux pots-de-vin ».
« Non aussi à une économie de la mise au rebut », a-t-il ajouté, en affirmant que celui qui aujourd’hui ne produit plus est vite exclu selon le modèle « consommer et jeter ».
A Turin, « l’exclusion de ceux qui vivent dans la pauvreté absolue » concerne « environ 10% de la population. On exclut les enfants – un taux de natalité zéro! -, on exclut les personnes âgées, et désormais on exclut les jeunes: plus de 40% de jeunes sans emploi », a dénoncé le pape.

Les Piémontais, ‘têtes dures’ —
Dans son homélie sur la grande place Vittorio, il est allé droit au coeur des Piémontais en évoquant des symboles forts de la culture régionale, dont sa grande-mère Rosa lui parlait à Buenos Aires quand il était enfant.
Des tonnerres d’applaudissements l’ont interrompu quand il a invoqué la « Consola », « massive et sans artifice », Vierge très populaire de Turin, et un poème très célèbre de l’écrivain local Nino Costa, qui décrit les immigrants piémontais (vers l’Amérique latine) « qui ont des têtes dures », qui « parlent peu mais savent ce qu’ils disent » et « qui cheminent adagio (lentement) mais vont loin ».
Maria, 60 ans, retraitée, exprime sa joie de voir enfin ce pape du pays, qui « n’est pas hypocrite ». « J’espère que l’entourage, ces politiciens du Vatican, le laisseront travailler ».
Diego (40 ans) et Barbara (35 ans), employés des postes, sont venus saluer ce pape « honnête qui n’a pas peur de parler de toutes les choses ».
Cette visite est été organisée aussi pour célébrer le bicentenaire de Saint Giovanni (Jean) Bosco, grande figure du catholicisme italien et du Piémont, « apôtre des jeunes » qui s’est consacré à l’éducation des enfants défavorisés, à l’origine de la congrégation des Salésiens.
Le pape s’est aussi recueilli devant l’autel du bienheureux Pier Giorgio Frassati, jeune intellectuel catholique, fils du propriétaire du quotidien La Stampa, qui, après la Première guerre mondiale, avait cherché à réaliser une synthèse entre le monde libéral et le monde catholique.

Afp