En Italie, le parti post-fasciste de Giorgia Meloni donné vainqueur des législatives

En Italie, le parti post-fasciste de Giorgia Meloni donné vainqueur des législatives

26 septembre 2022 Non Par Fatou Kane

Le parti post-fasciste Fratelli d’Italia, dirigé par Giorgia Meloni, est arrivé en tête des législatives de dimanche en Italie, selon les sondages de sortie des urnes. L’alliance des droites, formée avec la Ligue de Matteo Salvini et Forza Italia de Silvio Berlusconi, devrait disposer d’une majorité parlementaire. La France prévient : elle sera attentive au « respect » des droits humains et de l’avortement.

L’extrême droite italienne a confirmé, dimanche 25 septembre, la percée prédite par les sondages aux élections législatives. Le parti post-fasciste Fratelli d’Italia, dirigé par Giorgia Meloni, est arrivé en tête, selon des sondages réalisés à la sortie des urnes, un fait sans précédent depuis 1945.

L’alliance des droites formée par Fratelli d’Italia, la Ligue de Matteo Salvini et Forza Italia de Silvio Berlusconi semble assurée de disposer d’une majorité parlementaire.

Fratelli d’Italia a recueilli entre 22 et 26 % des voix, tandis que ses partenaires de coalition, la Ligue d’extrême droite de Matteo Salvini et le parti conservateur Forza Italia de Silvio Berlusconi, ont récolté respectivement entre 8,5 et 12,5 % et entre 6 et 8 % des votes, selon le sondage de l’institut Opinio pour la Rai.

La coalition a un « net avantage aussi bien à la Chambre qu’au Sénat », s’est réjoui sur Twitter Matteo Salvini. « La nuit sera longue, mais je veux déjà vous remercier. »

Le bloc de droite et d’extrême droite est crédité par les sondages de 43 % des voix, Fratelli d’Italia devançant nettement ses alliés avec 22,5 à 26,5 %, ce qui garantirait à Giorgia Meloni de devenir la première femme présidente du Conseil.

Cette dernière a revendiqué dans la nuit la direction du prochain gouvernement. « Les Italiens ont envoyé un message clair en faveur d’un gouvernement de droite dirigé par Fratelli d’Italia », a déclaré Giorgia Meloni lors d’une brève allocution à la presse à Rome. « Nous gouvernerons pour tous » les Italiens, a-t-elle promis.

La France préoccupée par les droits humains

La réaction française ne s’est pas fait attendre. La France sera « attentive » au « respect » des droits de l’Homme et du droit à l’avortement en Italie, a averti lundi la Première ministre Elisabeth Borne.

« Bien évidemment, on sera attentif et, (avec) la présidente de la Commission européenne (Ursula von der Leyen), à ce que ces valeurs sur les droits de l’Homme, sur le respect des uns et des autres, notamment le respect du droit à l’avortement, soient respectées par tous », a-t-elle déclaré sur BFMTV.

La cheffe du gouvernement a toutefois estimé qu’il ne « fallait pas brûler les étapes » et rappelé qu’il « appartient désormais au président de la République (Sergio Mattarella) de désigner la présidente ou le président du Conseil ».

Dans le camp de la majorité présidentielle, le président du MoDem, François Bayrou, a affirmé sur FranceInfo que « l’on sent bien l’espèce de vague, de dérive dans toute l’Europe. Il y a une très grande inquiétude chez les peuples auxquelles il faut répondre ».

L’extrême droite française a, en revanche, salué la victoire de Giorgia Meloni aux législatives en Italie, où pour la première fois depuis 1945 un parti post-fasciste accède au pouvoir.

« Le peuple italien a décidé de reprendre son destin en main en élisant un gouvernement patriote et souverainiste », a écrit Marine Le Pen sur Twitter, félicitant Giorgia Meloni et le chef de la Ligue Matteo Salvini, « pour avoir résisté aux menaces d’une Union européenne anti-démocratique et arrogante ».

« Triste soirée pour le pays »

Le bloc de centre-gauche constitué autour du Parti démocrate obtiendrait pour sa part entre 25,5 et 29,5 %, le Mouvement Cinq étoiles (populiste) devant se contenter de 13,5 à 17,5 %.

Le Parti démocrate a concédé tôt lundi matin la défaite, ajoutant qu’il deviendrait la principale force d’opposition au Parlement. « C’est une triste soirée pour le pays », a déclaré Debora Serracchiani, députée membre du Parti démocrate, à des journalistes. « (La droite) a obtenu majorité au Parlement, mais pas à l’échelle nationale. »

Le taux de participation à la clôture des urnes chute à 64,07 %, contre 73,86 % en 2018.

Plusieurs heures seront sans doute nécessaires avant d’obtenir un décompte précis des sièges dans les deux chambres du Parlement, compte tenu du mode de scrutin mixte, combinant scrutin majoritaire et scrutin proportionnel.

Dédiabolisation réussie

Fratelli d’Italia doit son succès autant aux promesses non tenues de ses adversaires et au vent de « dégagisme » qui souffle sur la péninsule, qu’au charisme de sa dirigeante.

Giorgia Meloni, Romaine de 45 ans qui, jeune militante, disait admirer Mussolini, est parvenue à dédiaboliser son image et rassembler sur son nom les peurs et les colères de millions d’Italiens face à la flambée des prix, le chômage, les menaces de récession ou l’incurie des services publics.

Quel que soit le gouvernement italien issu des élections, qui ne prendra ses fonctions qu’au plus tôt fin octobre, son chemin apparaît d’ores déjà semé d’embûches et sans grande marge de manœuvre. Il devra notamment gérer la crise causée par l’inflation galopante, alors que l’Italie croule déjà sous une dette représentant 150 % du PIB, le ratio le plus élevé de la zone euro derrière la Grèce.

Alliance fragile

Dans ce pays à l’instabilité gouvernementale chronique, les experts s’accordent déjà sur la courte espérance de vie de la coalition victorieuse, un mariage de raison entre trois alliés aux ambitions concurrentes.

Giorgia Meloni, sans expérience gouvernementale à part un passage éphémère au ministère de la jeunesse (2008-2011), aura fort à faire pour gérer ses encombrants alliés, bien plus expérimentés : Silvio Berlusconi a été plusieurs fois chef de gouvernement et Matteo Salvini, ministre de l’Intérieur et vice-Premier ministre.

Dans le dossier ukrainien, l’Europe et les alliés de l’Italie, membre de l’Otan, scruteront également la répartition des portefeuilles entre les trois partis. Car si Giorgia Meloni est atlantiste et soutient les sanctions frappant Moscou, Matteo Salvini s’y oppose.