Le nombre de migrants interceptés sur le littoral belge en forte baisse

Le nombre de migrants interceptés sur le littoral belge en forte baisse

12 janvier 2023 Non Par Fatou Kane

En 2022, 1 065 exilés ont été interceptés en Flandre occidentale, au nord-ouest de la Belgique, contre 4 100 l’année précédente. Une baisse conséquente qui s’explique, selon les autorités, par les moyens mis en oeuvre pour surveiller le port de Zeebruges, là où les migrants tentent de grimper à bord des conteneurs en partance pour le Royaume-Uni.

C’est une baisse drastique. En 2022, 1065 migrants ont été interceptés en Flandre occidentale, au nord-ouest de la Belgique, contre 4 100 en 2021. D’après le gouverneur de la province Carl Decaluwé, 60% des interceptions ont eu lieu dans les zones côtières, principalement dans le port de Zeebruges et ses alentours. C’est depuis ce port, en mer du Nord, que partent de nombreux navires pour l’Angleterre. Les exilés tentent donc de grimper à bord des camions, embarqués ensuite sur les cargos avant de prendre la mer.

Sur l’année écoulée, 250 tentatives de passages y ont été détectés, soit une diminution de 90% par rapport à 2018, où les autorités portuaires en avaient dénombré 2 500.

Les 40% des interceptions restantes sont réparties à l’intérieur des terres de Flandre occidentale. La plupart des migrants appréhendés par les forces de l’ordre flamandes « sont originaires d’Algérie, d’Érythrée et du Maroc », précise le journal La Libre.

Un port de plus en plus surveillé avec l’argent du Royaume-Uni

Parmi les raisons qui expliquent cette forte baisse : le « Harbour Security Plan Zeebrugge », un plan qui vise à sécuriser les abords du port. Depuis 2018, les autorités britanniques font partie des principaux investisseurs de ce projet. En 2022, « un budget supplémentaire avoisinant les 4,5 millions d’euros » a même été débloqué, indique encore La Libre. Cet argent servira à financer notamment des caméras intelligentes.

« À partir du deuxième trimestre 2023, la salle commune de contrôle de la sécurité (CSCR) [une salle de surveillance] doit également devenir pleinement opérationnelle et connecter tous les moyens de détection dans toute la zone portuaire », a précisé Carl Decaluwé.

Zeebruges est situé sur le littoral belge, au nord du pays. Crédit : Google Maps
Zeebruges est situé sur le littoral belge, au nord du pays. Crédit : Google Maps

Monter à bord des camions pour ensuite prendre la mer reste dangereux pour les exilés. Le 1er mars 2021, huit migrants enfermés dans un conteneur au port de Zeebruges ont frôlé la suffocation. À cours d’oxygène, ce sont les exilés eux-mêmes qui ont donné l’alerte en appelant les autorités depuis leur conteneur. Un incident similaire s’était produit quelques semaines plus tôt, lorsque des exilés s’étaient retrouvés coincés dans un camion. Peinant à respirer, ils avaient dû frapper contre les parois du véhicule avant d’être libérés, après 24 heures de calvaire.

En octobre 2019, c’est encore une fois à Zeebruges qu’avait été chargé le conteneur frigorifique dans lequel ont été retrouvés, peu après le déchargement en Angleterre, les corps sans vie de 39 migrants vietnamiens.

Base arrière des passeurs

La collaboration belgo-britannique qui s’opère dans le port s’exerce aussi dans des opérations de lutte contre le trafic d’êtres humains. Car la Belgique, plus qu’un pays de départs pour les migrants, est surtout une base arrière pour les passeurs qui organisent les traversées de la Manche depuis les côtes françaises. En cause, selon le média flamand De Tijd ? « La proximité de la côte nord de la France et des ports » mais aussi la présence de « parkings autoroutiers le long de l’E40 vers la France, prisés par les organisations de trafic d’êtres humains ».

Les arrestations de passeurs dans la province sont donc régulières. Le 30 octobre 2022, deux hommes de 34 et 44 ans originaires de Basingstoke en Angleterre ont été interpellés sur la côte belge, soupçonnés de faire partie d’un réseau de passeurs qui organiserait notamment le transit de réfugiés albanais. Les autorités belges ont également procédé à l’interpellation du groupe de douze exilés qui les accompagnait.

Un an avant, en octobre 2021, la police belge avait découvert plusieurs bateaux et moteurs cachés à l’arrière d’un véhicule, à la frontière entre la Belgique et la France. Ils avaient été cachés là par un ressortissant iranien établi au Royaume-Uni, et finalement présenté à un tribunal le 5 mai 2022. Après cette découverte, le procureur de Bruges, Frank Demeester, avait confirmé que le matériel utilisé par les trafiquants – bateaux pneumatiques, gilets, moteurs, jerrycans – transitait souvent par la Belgique « pour être utilisé en France ».

La Belgique, territoire privilégié des réseaux de trafiquants de migrants

D’après lui, « la police fédérale belge déploie d’importants moyens pour contrecarrer ces actes de trafic d’êtres humains. Et il est maintenant de notoriété publique que la coopération internationale avec les collègues britanniques de la National Crime Agency et avec nos partenaires européens est très bonne pour contrer ce phénomène ».

Deux tentatives de passages par la mer en un an

Beaucoup plus rarement, certains exilés tentent d’atteindre le Royaume-Uni par la mer, directement depuis les côtes flamandes. Entre octobre 2021 et octobre 2022, seules deux tentatives de traversée de la Manche ont été interceptées, selon les chiffres obtenus par le député Jasper Pillen et repris par le site d’information DH. Et entre le 1er janvier 2018 et juin 2021, 14 tentatives au total ont été déjouées, avec un pic de huit tentatives en 2020.

L’un des derniers sauvetages dans la zone a été opéré le 27 octobre 2021, lorsque 24 migrants qui tentaient de rallier l’Angleterre dans une embarcation de fortune ont été interceptés, à plus de 40 km au large de Zeebruges. Selon la presse flamande, ces personnes – 22 hommes et deux femmes dont une dame âgée – étaient en mer depuis deux jours au moment du sauvetage.

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Malgré des chiffres très bas, la Belgique « ne peut pas fermer les yeux sur les problèmes auxquels sont confrontés nos voisins, a fait savoir Jasper Pillen. La Manche est l’affaire de tous les pays qui l’entourent. Chaque pays doit faire preuve d’engagement ».